
Dans une société où la vie se peint en plusieurs couleurs, les histoires ne manquent pas. Il en va d'une saga de relations humaines qui se vit au dépend de chaque personnage que Nathasha Pemba nous décrit dans ce recueil de nouvelles : « Polygamiques ». Un ouvrage qui contient huit nouvelles, chacune avec sa particularité. Pourtant, l'essence est le même : le thème de la polygamie ou le polyamour.
Qui est Nathasha Pemba ? C'est une écrivaine et essayiste, née à Pointe-Noire en République du Congo. Passionnée de la philosophie et la littérature, elle s'intéresse également à la question du vivre-ensemble dans les sociétés multiculturelles. Co-auteur de l'anthologie des femmes congolaises « Sirènes des sables ».
« Polygamiques » est son tout premier ouvrage de fiction paru aux Editions La Doxa en Mars 2015. Il contient huit nouvelles sur 181 pages.
Avec un style limpide, l'auteur nous amène à la découverte des réalités africaines, notamment celles du Congo. Il est évoqué dans cet ouvrage des personnages tels que : Nathalie, Mbiyavanga, Odinga, Ismaël etc...
Ces personnages ont des rôles purement originaux mais rattachés au noyau du recueil qu'est la relation qu'on entretient avec autrui. Une relation qui va du complexe d'infériorité à la convoitise et à la ruse dans « Ma future belle-mère » ( première nouvelle ); ou encore, du trouble familial et du sacrifice avec Ismael dans « Le secret » ( dernière nouvelle ).
Ces histoires étalées ici nous rappelle le principe de la force et de la faiblesse dans les relations humaines. L'un pour mener le jeu et l'autre pour subir le jeu. Ceci est clair dans « Troisième bureau » avec Odinga. Un vrai ''macho'' qui a le contrôle sur tout dans sa vie, ou plutôt, ''ses vies'' maritales. L'avis d'une femme pour lui n'est que simple caprice dans le mariage. L'auteur l'illustre à la page 129 pendant la conversation entre Odinga et sa deuxième épouse :
- Et si je dis non, que feras-tu ?
- Mélanie, je ne suis pas venue te demander ton autorisation. Je suis juste venu t'annoncer une nouvelle. Je suis polygame. Donc même sans ton consentement temporel, je me marierai.
En effet, le thème de la polygamie que développe l'auteure pousse à faire s’imaginer que tous les hommes ont une âme de polygame. Mais, il y en a qui ont peur du regard des autres, de leur jugement. En effet, pour tous les polygames comme pour Odinga, l'amour a une autre définition.
La description des faits et des lieux dans cet ouvrage nous rapproche de la réalité. De façon brusque, on peut s'y perdre dans la stupéfaction, tout comme s'y retrouver dans une émotion forte. La couleur bleue revient plusieurs fois : bleu ciel ou encore bleue turquoise. Une touche d'humour ne nous laisse pas pantois lors de la lecture, tel que dans « L'intellectuel du quartier » avec Pater Bissila. Que dire de toute cette culture générale lorsque l'auteur nous situe Loudima ( Ville-district dans la Bouenza ) au Congo et nous retrace l'origine des ''Abacosts'' sur la page 88 ?
« Polygamiques » n'est pas que polygamie. Cet adjectif que Nathasha Pemba a choisi pour titre, émane des faits qui sont des retombés de la polygamie dans certaines familles. Ceci éclaircit au mieux un certain impact sur la vie de ceux qui manquent une affection paternelle, celles qui cherchent une attention de ce genre dans leurs conquêtes amoureuses, ceux qui se sacrifient pour prendre les responsabilités dans leurs familles même étant jeunes...
La première de couverture de ce recueil de nouvelles dégage la tradition. Une Afrique où des us et coutumes resteront le pilier et seront là en faveur des hommes comme toujours. Qui dit polygame, dit le sexe fort et donc le pouvoir, l'appel à la soumission à auquel la femme doit forcement répondre même quand elle souffre dans son foyer. Mais quelle est cette femme aujourd'hui ?
Juvénale Obili,
Références,
Nathasha Pemba, Polygamiques, Rungis, La Doxa, 2015.