La féminité : Une responsabilité !
« A MA MERE
Femme noire, femme africaine,
ô toi ma mère je pense à toi... toi qui me portas sur le dos,
toi qui m'allaitas, toi qui gouvernas mes premiers pas, toi qui la première m'ouvris les yeux aux prodiges de la terre, je pense à toi... »
Ces paroles de Camara Laye, me rappellent beaucoup de choses…et davantage des nuits qu’il me fallait passer pour les mémoriser…Mais cela ne s’arrêtait là…Mémoriser, oui mais il fallait aussi mimer…mimer le texte même lorsqu’on était timide…pour éviter des problèmes avec maman, parce que quand l’on ne mimait pas son texte, on passait notre temps à tripatouiller le bout de notre uniforme scolaire ou bien le col de notre chemise…
Je n’oublierai jamais ces femmes de ma famille qui m’ont indiqué la route à suivre…ces femmes fortes qui sans chercher à prendre la place de l’homme savaient rester « elles-mêmes »…ses femmes dignes qui ont réussi et guidé nos pas…
C’est à elles et à toutes les autres femmes que je continue de rencontrer chaque jour…c’est à vous mamans, tantes, amies et sœurs que je rends hommage aujourd’hui, à travers ce texte…
Ces lignes tirées de « l’enfant noir » de Camara laye font l’éloge, non seulement de la maternité, mais aussi et surtout de la féminité, caractéristique propre de chaque femme. En effet, toute femme porte en elle non seulement l’anatomie et le physique de la féminité, mais aussi les valeurs de la féminité qui font d’elle une responsable privilégiée de la garde et de la sauvegarde de la vie.
Depuis bientôt plusieurs générations, la question de l’émancipation de la femme s’est imposée dans l’univers socio-politique, tant au niveau continental qu’au niveau planétaire. Mais ce fait ne se limite pas à la planète et au continent, car la question de la femme va bien au-delà, dans la mesure où elle est une préoccupation existentielle qui rejoint la structure de base familiale.
Cette question qui touche aussi la religion, me fait penser à Joseph Albert Cardinal Malula qui disait, au sujet des sœurs Thérésiennes de Kinshasa : « Devenez d’abord des femmes accomplies, des religieuses authentiques ensuite. Dans mon idée, femmes accomplies signifie femmes responsables, des femmes qui ont des convictions personnelles et s’efforcent de les mettre en pratique et de les faire partager, des femmes qui agissent, capables d’initiatives et d’expériences originales ». Une phrase qui reste fondamentale, car elle invite les « sœurs » qui sont avant tout des femmes, à exalter les valeurs de la féminité.
Je pense qu’aujourd’hui il s’agit donc pour la femme d’être d’abord femme en toute fierté et dignité et de s’assumer, avant de prétendre à autre chose. La question de l’émancipation de la femme est d’abord une question de la prise en compte de sa féminité qui, à la suite s’extérioriserait dans sa manière d’être femme en société. D’où, loin d’être une recherche d’indépendance et de liberté sans borne, l’émancipation de la femme consiste d’abord au respect de sa propre personne et au respect des valeurs de sa féminité. Ce qui lui permettrait de se situer davantage dans l’ordre de l’être que de l’apparence.
En relisant l’histoire des cultures congolaises, par exemple, il est sans conteste que la femme congolaise a toujours occupée une place de choix, de manière naturelle dans la vie de la société. Une responsabilité qu’elle a toujours portée en elle et avec elle, en toute modestie, en se mettant au service de l’autre. Toutefois, sans vouloir récuser la dimension émancipatrice de la femme, il s’agit ici simplement de souligner les dimensions responsabilisantes de la féminité. Car se confiner dans une idéologie revendicatrice ne fera pas de la femme une femme, d’autant plus que ce sont les valeurs qui sont en elles qu’elle est appelée à mettre en avant et c’est cela qui fera d’elle une femme responsable. Comme on peut le constater, dans toute structure sociale, la femme, que ce soit celle qui occupe le poste d’ingénieur ou celle qui gère les stocks de son foyer, se doit avant tout d’assumer sa féminité, incarnation de sa figure de responsable. Notons aussi que par-delà la génitalité, la féminité est une attitude, une attitude qui va à l’encontre des tendances de masculinisation, car l’émancipation de la femme ne consiste pas à contrefaire l’homme.
Ainsi donc parmi les lieux de la responsabilité de la femme, nous avons ciblé la liberté, l’égalité dans la différence, l’autonomie, la maternité. Une égalité dans la différence entre homme et femme implique d’être soi-même, car la différence ce n’est pas de l’infériorité ni de la supériorité, c’est être soi-même, se respecter devant l’autre. Il s’agit aussi pour la femme d’affiner sa nature singulière, mais non inférieure, ni supérieure, ainsi que le souligne France Querré : « On ne reprochera à personne d’affirmer la différence entre l’homme et la femme. Mais on lui fera un grief d’en faire immédiatement un différend ». L’exigence d’être soi-même ne signifie absolument pas l’exigence d’être seul, puisque le soi se construit grâce à un proche, un autrui significatif, qui, dans un contexte ou dans un autre peut être un homme ou une femme.
Pour finir, je suis tentée de dire : « c’est une chance d’être femme », non ! Je ne le dirai pas. Je dirai plutôt : c’est une chance d’être une personne. Car cette égalité, cette égalité en humanité, c’est ce qui compte, c’est ce qui est le plus important. L’homme et la femme sont égaux d’un point de vue ontologique. Au niveau de l’égalité des conditions, je dirai que si la femme, au niveau de la société veut accéder aux mêmes positions que les hommes, elle doit se montrer humaine, égale et compétente. En effet« une femme ne serait considérée comme promue, intégrée, émancipée, ou libérée qu’à travers une certaine manière de penser, d’être et dans la stricte considération de sa personne » (S Ngah Ateba). Que la femme, où qu’elle se trouve n’hésite donc pas à se faire chirurgien, écrivain, entrepreneure, Ingénieure, chauffeur de Bulldozer, juriste, philosophe, infirmière, bloggeuse. Bref, qu’elle se révèle simplement comme un être capable.
Nathasha Pemba